Le Pistachier : une culture d’avenir au Maroc

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Mustapha AITCHITT, Abdessalam CHOURA, Mahmoud CHOURA

Et si la pistache devenait la prochaine success story agricole du Maroc ? Dans un contexte où les agriculteurs sont de plus en plus confrontés à la raréfaction de l’eau, à la dégradation des sols et à la volatilité des marchés, le besoin de cultiver autrement se fait ressentir. C’est dans ce paysage en mutation que le pistachier commence à se frayer un chemin, porté par sa résilience remarquable, son faible besoin en intrants et un marché mondial en pleine expansion.

Longtemps ignoré dans nos schémas de production, cet arbre robuste pourrait bien représenter une alternative durable, notamment pour les zones arides et semi-arides du pays. Mais que savons-nous vraiment de cette culture ? Est-elle réellement adaptée à notre terroir ? Quels sont ses atouts, ses exigences et ses perspectives économiques ?

Commençons par un peu de botanique

Le  pistachier  (Pistacia  vera)  appartient  à  la  famille des  Anacardiacées  dans  laquelle  on  retrouve  des cultures  comme  l’anacardier  (noix  de  cajou)  et  le manguier.  Il peut atteindre  une  hauteur  de  5  à  7 mètres  et  développe  souvent  plusieurs  troncs.  Ses feuilles  caduques  sont  composées  et  alternes, généralement trifoliées.

Le pistachier est dioïque, ce qui signifie qu’il existe des plants  mâles  et  des  plants  femelles  et  qu’une pollinisation  croisée  est  obligatoire  pour fructifier.

Les  fleurs,  apétales  et  de  petite  taille,  apparaissent  en  grappes  au  printemps  et  sont pollinisées  par  le  vent  (anémophilie).  Le fruit  est  une  drupe  contenant  une  graine comestible, la pistache, enveloppée dans une coque dure.

Histoire du Pistachier dans le Monde

La culture du pistachier remonte à plus de 3,000 ans et est originaire d’Asie centrale, plus précisément des régions actuelles de l’Iran, de l’Afghanistan et des zones limitrophes du Turkménistan. La culture du pistachier s’est développée en Perse (Iran actuel), en Syrie et en Grèce (via les conquêtes d’Alexandre le Grand), puis dans le bassin méditerranéen par les Perses et les Grecs, en Europe (principalement Italie et Espagne) via la Rome antique et vers la Chine par la route de la soie.

Aux Etats-Unis, ce n’est que dans les années 1930 que les premiers essais étaient lancés au cœur de Central Valley en Californie. Aujourd’hui, les principaux producteurs mondiaux sont les États-Unis (Californie), l’Iran, la Turquie et la Syrie.

Du fait de sa  résilience  et  de  son  adaptation  aux  climats  arides  et  semi-arides,  le pistachier s’est également répandu en Afrique du Nord, notamment la Tunisie avec plus de 30 000 hectares cultivés principalement à Gafsa et à Kasserine. Son introduction dans ces régions remonte à l’Antiquité, grâce aux échanges commerciaux entre les Perses, les Phéniciens, les Grecs et les Romains. Dans cette zone, on trouve aussi d’autres espèces de pistachiers  sauvages,  comme  Pistacia  atlantica  et  Pistacia  lentiscus,  qui  sont  plus résistantes aux conditions locales et souvent utilisées comme porte-greffes pour Pistacia vera.

Exigences pédoclimatiques

Cet arbre fruitier se distingue par sa grande résistance à la sécheresse. Il se développe idéalement dans des climats arides et semi-arides, caractérisés par des étés chauds et secs  ainsi  que  des  hivers  froids,  conditions  indispensables  pour  une  bonne  induction florale.

Quelle que  soit  la  variété,  le  pistachier  s’adapte  à  une  large  gamme  de  sols,  mais  il préfère les sols bien drainés, sableux ou argilo-calcaires, avec un pH légèrement alcalin. Il  tolère  bien  la  salinité  et  peut  survivre  avec  des  précipitations  faibles,  bien  qu’une irrigation contrôlée améliore considérablement le rendement.

Une culture résiliente par excellence

Le pistachier (Pistacia  vera)  est  une  espèce  résiliente  qui  s’adapte  à  des  conditions environnementales difficiles. Voici quelques arguments démontrant sa résilience :

1.  Tolérance  à  la  sécheresse  :  Le  pistachier  est  une  plante  xérophile  capable  de survivre avec de faibles précipitations annuelles. Son système racinaire profond lui permet d’exploiter les ressources en eau en profondeur. A titre de comparaison, le  pistachier  a  besoin  de  moitié  moins  d’eau  que  l’amandier  pour  croître  et produire.

2.  Adaptabilité  aux  sols  pauvres  :  Il  peut  pousser  dans  des  sols  rocailleux, sablonneux et à faible fertilité, là où d’autres cultures agricoles échouent. Il tolère également des sols légèrement salins.

3.  Résistance aux températures extrêmes : Il supporte des températures élevées allant jusqu’à 45°C en été et résiste bien aux hivers froids, avec une tolérance à des températures négatives (-10 à -20°C selon les variétés).

4.  Résistance à la salinité : Les expérimentations et les retours multiples d’exploitants montrent que le pistachier peut tolérer des niveaux de salinité allant jusqu’à 9-10g/l, ce qui est fait l’une des cultures les plus résistantes à la salinité loin devant l’amandier, les agrumes et l’olivier.

5.  Longévité et faible entretien : Un pistachier peut vivre plus de 100 ans et produire des fruits pendant plusieurs décennies avec un entretien minimal, ce qui en fait une culture durable et rentable à long terme.

6.  Faible  besoin  en  intrants  :  Contrairement  à  d’autres  cultures  fruitières,  le pistachier  nécessite  peu  d’engrais  et  de  traitements  phytosanitaires,  réduisant ainsi son impact environnemental et sa dépendance aux produits chimiques.

7.  Résistance  aux  maladies  et  ravageurs  :  Bien  qu’il  puisse  être  affecté  par certaines maladies (comme la verticilliose), il est globalement moins sensible que d’autres cultures fruitières aux attaques parasitaires.

Grâce  à  ces  caractéristiques,  le  pistachier  constitue  une  culture  résiliente  et prometteuse,  particulièrement  adaptée  aux  zones  arides  et  semi-arides  du  pourtour méditerranéen  et  d’Afrique  du  Nord.  Cette  culture  y  est  présente  historiquement,  bien que  souvent  marginalisée  par  d’autres  cultures  historiquement  plus  rentables  comme l’olivier et l’amandier.

Une culture rentable et d’avenir

Le  pistachier  est  une  culture  d’avenir  au  Maroc,  stratégique  et  adaptée  aux  défis climatiques et économiques actuels.

1.  Rentabilité élevée : La pistache se vend entre 60 et 100 dhs/kg, avec un hectare pouvant produire en moyenne 2 Tonnes/ha selon les variétés et les conditions de production.

2.  Demande  mondiale  en  croissance  :  Marchés  en  expansion  localement,  en

Europe, aux États-Unis et en Asie, offrant des opportunités d’exportation.

3.  Adapté  aux  zones  arides  :  Faible  consommation  d’eau  et  résilience  aux conditions difficiles, idéal pour l’Afrique du Nord et le pourtour méditerranéen.

4.  Coûts d’entretien réduits : Grâce à sa rusticité et à sa faible susceptibilité aux maladies,  le  pistachier  demande  un  suivi  phytosanitaire  réduit,  en  plus  de  ses besoins en fertilisants et irrigations faibles ce qui contribue à la rentabilité et à la durabilité de sa culture.

Sans aller loin, si l’on jette un œil chez notre voisin tunisien, le pistachier serait devenu la troisième  culture  prédominante  après  l’olivier  et  l’amandier  en  raison  de  la  demande croissante du marché local et de rendements intéressants. Chez notre voisin espagnol, il s’agit de la culture ayant connu le bond le plus important en termes de superficie cultivée (+2,000%) passant d’environ 3 000 hectares à plus de 66 000 hectares en l’espace de 10 ans.

Chez  nous  au  Maroc,  les  importations  de  pistaches  ont  été  multipliées  par  5  pour atteindre 1 800 tonnes de 2018 à 2022, les États-Unis étant le principal exportateur de ce fruit sec vers le marché marocain.

On  voit  ainsi  la  pistache  se  frayer  un  chemin  vers  nos  assiettes  que  ce  soit  pour agrémenter nos pauses thé, aromatiser nos glaces ou couronner nos desserts.

Mais alors, pourquoi nous n’en produisons pas au Maroc?

Au Maroc, le pistachier existe à l’état sauvage, dans des variétés qui ne produisent pas de fruits comestibles. Pour les variétés productrices de fruits, la culture du pistachier est quasi inexistante bien que présentant un immense potentiel.

Le pistachier séduit de plus en plus les agriculteurs en raison de sa résilience et de son potentiel  économique.  Il représente  une  alternative  viable  dans  les  zones  où  les ressources en eau sont limitées et / ou saumâtres.

Néanmoins, cette culture fait face à certains obstacles parmi lesquels :

•  La réticence au changement

•  Le manque de connaissance technique pour la conduite du pistachier

•  L’existence d’idées préconçues et erronées sur la culture du pistachier

C’est pourquoi nous avons décidé de jeter un éclairage sur cette culture et sur ce que nous pensons être pertinent pour notre pays.

Point sur les segments commerciaux

Il existe principalement 2 segments pour la production de pistachier :

–  segment  snacking  destine à  la  consommation  directe  avec  des  fruits  déhiscents  (coque ouverte)

– segment industriel destiné à l’industrie agro-alimentaire (pâtisserie, glacier, biscuiterie, etc.) avec des fruits dont la coque reste fermée

Bien  que  la  conduite  technique  de  la  culture  soit  capable  de  jouer  sur  le  taux  de déhiscence (proportion de fruits avec la coque ouverte vs. fermée), il existe différentes variétés connues pour chacun des 2 segments cités au-dessus:

•  Variétés industrielles : Mateur (Tunisie), Aegina (Grèce), Larkana (Chypre), Napoletana (Italie).

•  Variétés de snacking : Sirora (Australie), Golden Hills (Etats-Unis), Lost Hills (Etats-Unis),  Kaleh Ghouchi (Iran), Kerman (Iran).

Parmi  les  variétés  citées  on  retrouve  la  fameuse  Kerman,  du  nom  de  la  métropole iranienne, très répandue en raison de sa productivité et de la qualité de ses fruits mais aussi la Mateur, du nom de la ville du gouvernorat de Bizerte en Tunisie, connue pour sa rusticité.

Ces  variétés  ont  besoin  d’un  porte-greffe,  et  l’on  retrouve  au Maroc  des  espèces  sauvages comme Pistacia atlantica, Pistacia lentiscus et Pistacia terebinthus, mais aussi le célèbre porte-greffe UCB-1 qui est un hybride Pistacia atlantica × Pistacia integerrima. UCB-1 est le nom abrégé du porte-greffe hybride de pistachier #1 de l’Université de Californie à Berkeley, inventé par le Dr Lee Ashworth du département de pathologie végétale de l’UCB.

De nos jours le porte-greffe UCB-1 est le plus répandu dans les nouvelles plantations de pistachiers. Il est tolérant à la salinité, favorise une croissance homogène et vigoureuse du verger, et est résistant au Verticillium et d’autres maladies fongiques.

Entretien et conduite technique

•  Plantation : Le pistachier est généralement planté avec un espacement moyen de 6 à 7 mètres entre les arbres. Afin d’assurer une pollinisation adéquate, il est capital d’inclure des mâles à raison d’1 mâle pour 8-10 femelles.

•  Taille : Une taille de formation est nécessaire en 1ère-2ème année pour assurer une bonne architecture de l’arbre et favoriser la production de fruits. Ensuite, une taille légère  est  recommandée,  principalement  pour  éliminer  les  branches  mortes  et favoriser  la  circulation  de  l’air  et  l’ensoleillement.  Cela  aide  à  prévenir  les maladies et améliore l’aération autour des arbres.

• Irrigation :  Bien  que  tolérant  à  la  sécheresse,  le  pistachier  répond  bien  à  une irrigation  modérée  en  période  critique  (floraison  et  grossissement  des  fruits). Néanmoins, nous avons constaté que les plants de pistachiers répondaient mal à un excès d’eau, ce dernier causant une pourriture des racines et le développement de phytophtora.

• Fertilisation :  Le  pistachier  nécessite  peu  d’engrais.  Cependant, il est recommandé  d’appliquer  un  engrais  riche  en  azote  au  printemps  et  un  engrais riche en phosphore et potassium avant la floraison pour stimuler la production. En  dehors  des  macro-éléments,  il  est  recommandé  d’apporter  un  mix  de microéléments (fer, bore, magnésium, calcium et zinc) pour garantir une nutrition optimale du verger.

•  Protection Phytosanitaire : Le pistachier est relativement résistant, mais il peut être affecté par des ravageurs comme les psylles, des champignons comme le verticillium,  l’alternaria  ou  le  phytophtora  en  cas  d’excès  d’eau.  Une surveillance régulière et des traitements préventifs sont nécessaires.

Récolte

La  récolte  des  pistaches  a  lieu  entre  août  et  octobre  selon  les  régions.  Elle  peut  être manuelle ou mécanisée. Les fruits sont ensuite séchés pour réduire leur taux d’humidité et garantir une meilleure conservation.

L’entrée en production du pistachier varie significativement selon la conduite suivie. Une bonne conduite peut vous permettre de rentrer en production la 5è année, voir la 4è, alors  qu’une  mauvaise  gestion  peut  ralentir  le  développement  du  verger  et  repousser l’entrée en production à la 8è année.

De même, le rendement par hectare est sujet à de fortes variations. Les rendements réels varient en fonction de divers facteurs, notamment les pratiques agricoles spécifiques, les conditions climatiques et les variétés de pistachiers cultivées. Une production moyenne correcte pour un verger irrigué oscille entre 2 et 3 tonnes / hectare.

En conclusion

Le pistachier représente une culture d’avenir, parfaitement adaptée aux défis climatiques actuels. Son faible besoin en eau, son adaptation aux sols arides et son marché  en  pleine  croissance  en  font  un  choix  stratégique  pour  les  agriculteurs marocains.

Afin de pallier au manque de connaissances sur cette  culture  au  Maroc,  il  est  important  de  se faire accompagner par un expert. C’est la raison pour laquelle,  Smart  Agriculture  Leader, pépinière agrée au Maroc, s’est alliée à Viveros Zuaime  en  Espagne  afin  de fournir  à l’agriculteur marocain une solution complète :

•  Des variétés dotées  d’un passeport sanitaire européen et greffées sur UCB-1

•  Un  design  de  plantation  adapté  au débouché commercial fixé (snacking vs. Industriel)

• Un accompagnement à chaque étape clé (choix variétal, plantation, taille, programme de fertilisation, etc.)

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Smart Agriculture Leader
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