Par: EDDABBEH Fatima-Ezzahra et EDDABBEH Layachi
f.eddabbeh@gmail.com – eddabbehlayachi@yahoo.fr
Le caroubier du genre Ceratonia famille des légumineuses compte deux espèces (Ceratonia siliqua et Ceratonia oreothauma). L’espèce siliqua, xérophile, thermophile et héliophile est la plus répandue dans le bassin méditerranéen en l’occurrence au Maroc où elle est d’une grande importance économique, sociale et environnementale, supportant les impacts des Changements climatiques (CC) et la pénurie de l’eau. Classée espèce forestière depuis 1948, elle est devenue espèce fruitière depuis 2008, lors de la présentation de la stratégie Plan Maroc Vert (PMV) par l’ex Ministre de l’Agriculture, du Développement Rural, de la Pêche Maritime et des Eaux et Forêts (MADRPMEF) devant sa Majesté le Roi Mohamed VI. Cette date a marqué la naissance d’une filière, depuis longtemps, oubliée et a suscité l’intérêt des investisseurs agricoles et industriels à saisir l’opportunité d’investir dans la plantation et la transformation d’un produit « ancien » nouveau, très demandé à l’échelle international et subventionnées par le MADRPMEF. La superficie de 30.000 ha, estimée par la FAO et rapportée par l’ensemble de la littérature scientifique, a depuis cette date connu des chiffres à la baisse dans l’ensemble des publications des administrations nationales ayant un lien direct ou indirect avec cette filière. La production annuelle de gousses et de graines de caroube n’est connue que par les professionnels. A ce jour aucun rapport ni article, de presse nationale, donnant une idée sur la production annuelle n’a été publié à l’instar des autres productions fruitières et maraichères, au moment où les responsables des grandes multinationales de production de la gomme de caroube (E410) rendent visite annuellement au Maroc pour estimer la production et passer des contrats de fourniture de graines avec les concasseurs.
Le présent article met en exergue l’intérêt économique, social et environnemental de l’espèce, les superficies réellement cultivées, la production annuelle en gousses et en graines, ainsi que l’évolution du prix à l’échelle nationale et internationale.
1. INTRODUCTION
Le caroubier à l’échelle international ne se trouve jamais en peuplement pur. Au Maroc on le trouve sous trois écosystèmes phytosociologiques, avec des espèces forestières et fruitières qui partagent son bioclimat (forestières : Thuya de berberie, Arganier, Chêne vert, Pistachier lentisque, Oléastre… fruitières : Olivier, Amandier, Figuier…).
- Ecosystème Ceratonio siliqua- Tetraclinitum articulata : en association avec le thuya de berberie (Tetraclinus articulata).
- Ecosystème Querco rotondifolia-tetraclinitum articulata sous association ceratonietosum : en association avec le thuya (Tetraclinus articulata) et le chêne vert (Quecus rotondifolia).
- Ecosystème Climatidi cirrhosa- Ceratonietum siliquae : en association avec la clématite de noël (Clematis cirrhosa).
De ce fait, à l’instar du palmier dattier, le caroubier naturel doit être recensé par nombre de pieds et non en superficie et toute intervention de plantation doit être basée sur une vue systémique de l’ensemble de l’écosystème.
2.IMPORTANCE ENVIRONNEMENTALE
- Ses fleurs mettent à la disposition des pollinisateurs une nourriture complète (nectar et pollen) au début de l’hiver.
- Son ombre, dense, qui ne laisse passer aucun rayon solaire constitue une aire de repos pour le cheptel et le gibier en période estivale.
- L’arbre en entier constitue un lieu de niche et de vie pour la faune en général, valorise les sols marginaux et lutte contre l’érosion hydrique et éolienne. Il développe également plus de 200 symbioses avec la microfaune du sol et les végétaux de son écosystème lui permettant de puiser l’eau et les sels minéraux pour résister aux hautes températures et au manque d’eau.
- Arbre permettant la séquestration des gaz à effet de serres dans des zones où d’autres végétaux ne peuvent supporter les impacts de CC.
3. IMPORTANCE ECONOMIQUE
Tous les intérêts environnementaux ont un prix, mais le caroubier permet de produire plusieurs récoltes sur la même parcelle. C’est un arbre agro écologique qui favorise la complémentarité et la facilitation entre les espèces animales et végétales avec lesquelles il vit.
- Arbre agrosylvopastoral (feuilles comme fourrage, le bois pour l’ébénisterie, le chauffage et le charbon, les graines pour les industries agroalimentaire E410, pharmaceutique, cosmétique, textile, impression, forage de pétrole, la pulpe pour l’alimentation humaine et animale, pour l’industrie pharmaceutique et cosmétique, le racines et la pulpe pour le tannage…)
- Plante entomophile, mellifère et pollinifère qui nécessite la présence d’insectes pollinisateurs en l’occurrence l’abeille domestique pour produire un miel de qualité classé au troisième rang au Maroc après celui de thym et d’euphorbe.
- Plante dont la production est une fonction exponentielle (production sur les branches de trois ans et plus), ce qui permet sa plantation sur de faibles densités et s’abstenir des opérations de tailles annuelles.
- Les branches de moins de trois ans constituent une protection de la production contre la grêle et les vents forts sans avoir besoin d’installation de filet anti grêle.
- Culture qui ne nécessite ni pesticide ni fertilisation vu ses caractères épigénétique et son architecture racinaire (pivotante et traçante) qui lui confèrent une coévolution avec les prédateurs et les ravageurs et l’exploitation de la roche mère pour puiser l’eau et les sels minéraux.
- Des études sur la pulpe ont montré qu’elle peut être utilisée dans la pâte à pain à raison de 10 à 12% ce qui permettra pour le Maroc la réduction du montant de la facture d’importation de blé. Elle entre également dans la fabrication de médicament contre l’obésité, le cholestérol, le diabète, le cancer du côlon…
4.IMPORTANCE SOCIALE
Le caroubier qui s’étend depuis l’altitude 1400 m des montagnes de l’Atlas (Haut Atlas, Moyen Atlas et Anti Atlas) jusqu’à une altitude de 200 à 300 m vers l’atlantique et la méditerranée, déduction faite des zones froides (en dessous de -7° C), concerne une population de l’ordre de 4 millions de marocains. Ainsi, il participe à l’équilibre économique et social de la population rurale, permet son cantonnement sur ses zones de vie par l’atténuation des impacts climatiques et du déficit pluviométrique et renforce son adaptation à ces contraintes. En effet, le caroubier a prouvé sa supériorité à l’adaptation aux CC par rapport à d’autres espèces (forestières : thuya, genévrier rouge, arganier… et fruitières : olivier, amandier, figuier et vigne en bour). Grace à son enracinement pivotant et traçant, sa production et son état végétatif verdoyant sont maintenus dans les zones où la tranche pluviométrique est descendue sous les 60 mm/an dans le centre du Maroc, au moment où les autres espèces fruitières et forestières connaissent un dessèchement.
5. SUPERFICIE DU CAROUBIER
Le caroubier est un arbre trioïque (mâle, femelle ou hermaphrodite). Le pourcentage de mâles naturels dépasse de loin celui des femelles. Il varie suivant les zones et oscille entre 54 et 64%, par conséquent, seuls 36 à 46% des arbres naturels sont productifs. L’alternance de production pour le caroubier est plus amplifiée que celle de l’olivier. Il existe des arbres qui produisent une année sur trois. En conséquence, ce sont 23% au maximum qui se trouvent en pleine production chaque année. Le reste est soit en alternance totale, soit avec une faible production.
En ce qui concerne la superficie du caroubier, « Media24 » rapporte que l’l’ANEF estime que la superficie totale de caroubier est de 80.000 ha dont 68.000 ha en forêt domaniale et 12.000 ha en terrain privés. Mme OUCHAGOUR LEILA a publié un article, sur les recherches à venir en la matière par l’INRA, qui stipule que la superficie de caroubier récoltable est de 11.160 ha avec une production de 59.700 T de gousses et que les plantations réalisées dans le cadre du PMV ont atteint 7.000 ha (fin 2020) soit un total de 18.160 ha.
– SUPERFICIE DU CAROUBIER NATUREL
Pour estimer la superficie dédiée au caroubier au Maroc, on doit se référer à la superficie occupée par cette espèce dans la région de Béni Mellal- Khénifra, dont la production annuelle de gousse et de graine représente respectivement 20 et 25% de la production nationale. En effet, NAGGAR et al., rapportent une superficie pour la Province d’Azilal de 150.000 ha dont 50.000 ha en forêt et 100.000 ha sur propriétés privées avec une densité de plus de 4 arbres à l’hectare. Une étude faite également par le service Provincial des Eaux et Forêts de Beni Mellal en 2012 fait ressortir une superficie de 53.000 ha, dont 67% sur domaine forestier et 33% sur propriétés privées, pour la Province de Beni Mellal avec une densité de plus de 4 arbres à l’hectare. Concernant la Province de Khénifra, EDDABBEH F.E. estime que la superficie de la carouberaie est de l’ordre de 50.000 ha. Sans tenir compte de la Province de Khouribgua qui abrite également cette espèce. La superficie totale qu’occupe le caroubier dans la région dépasse 250.000 ha. Si on se base sur ces chiffres et en extrapolant la production de cette région qui représente 20% de la production nationale, la carouberaie marocaine qui s’étende du Rif (nord) à l’Anti Atlas (sud) et de Tafoughalt (est) à Essaouira (ouest) dépasse un million d’hectares.
– SUPERFICIE PLANTEE DANS LE CADRE DU PMV
La superficie réalisée dans le cadre du Plan Maroc Vert est de l’ordre de 18.162 ha. La superficie programmée à être réalisée dans la cadre de la stratégie Génération Green à l’horizon 2030, y compris le reliquat non réalisé du PMV, s’élève à 125.956 ha.
Tableau 1: Superficies des plantations réalisées (PMV) et à réaliser (GG)
Régions économiques | Plantations réalisées P M V (2020) Ha | Objectif 2030 (GG) Ha | Plantation à réaliser (2030) Ha |
Oriental | 1.547 | 36.820 | 35.273 |
Marrakech-Safi | 3.613 | 33.000 | 29.387 |
Beni Mellal-Khenfra | 11.213 | 19.000 | 7.787 |
Sous -Massa | 0 | 16.558 | 16.558 |
Fes-Meknes | 817 | 13.000 | 12.183 |
Casablanca-Settat | 172 | 13.000 | 12.828 |
Tanger Alhousaima | 300 | 5.000 | 4.700 |
Rabat Sale Kenitra | 500 | 7.660 | 7.160 |
Daraa-Tafilalet | 0 | 80 | 80 |
TOTAL | 18.162 | 144.118 | 125.956 |
FAO Rapport provisoire 2024
La réalisation de ce programme, entamée en parallèle avec le greffage des arbres naturels non productif, permettra au Maroc, en plus de l’augmentation de la production, de réduire sa facture d’importation de blé de 10 à 12% par l’ajout de la pulpe de caroube à la farine de pâte à pain et sa facture d’importation de maïs et de soja de 40%, par l’utilisation de la pulpe de caroube dans l’alimentation animale.
6. PRODUCTION DE CAROUBE AU MAROC
La production moyenne annuelle de caroubes se situe entre 70.000 à 80.000 tonnes de gousses soit 14.000 à 16.000 tonnes de graines. Pendant les décennies 60 à 90 du siècle dernier, cette production était comprise entre 100.000 et 120.000 tonnes de gousses. Cependant l’année 2022 a été exceptionnelle avec une production de 30.000 tonnes de gousses et une chute remarquable des rendements en graines de 2 à 2,5 % suite à une mauvaise pollinisation provoquée par la mortalité des ruchers qui a eu lieu au moment de la floraison et le chergui qui a sévi au moment de la pollinisation qui ont eu pour conséquence des fruits faibles en graines.
Tableau 2: Production marocaine de la caroube (gousses et graines) au cours des cinq dernières années
ANNEE | PRODUCTION EN GOUSSES (T) | PRODUCTION EN GRAINES(T) | OBSERVATION |
2019 | 90.000 | 18.000 | |
2020 | 70.000 | 14.000 | |
2021 | 80.000 | 16.000 | |
2022 | 30.000 | 6.000 | |
2023 | 60.000 * | 10.000 | * Dont 15.000 T (Plantation PMV) |
Tableau 3: Production de gousses par région économique.
REGION ECONOMIQUE | PRODUCTION EN GOUSSES (T) | RENDEMENT EN GRAINES | |
Moyenne | 2023 | ||
Beni Mellal Khénifra | 25000 | 14000 | 24 à 26 % |
Marrakech Safi | 16000 | 10500 | 19 à 22 % |
Fes Meknes | 1200 | 5500 | 17 à 25 % |
Oriental | 10000 | 3500 | 15 à 22 % |
Tanger Tetouan | 9000 | 3500 | 15 à 18 % |
Sous Massa | 13000 | 7500 | 19 à 22 % |
Autres | 1000 | 500 | ———- |
PMV | —— | 15000 | |
TOTAL | 75000 | 60000 |
Tableau 4: Production mondiale par pays en graines 2023.
PAYS | PRODUCTION EN GRAINES (T) |
Maroc | 9.000 |
Espagne | 9.000 |
Portugal | 2.000 |
Italie | 3.000 |
Turquie | 2.000 |
Algérie | 2.000 |
Tunisie | 1.000 |
Chypre | 500 |
Autres pays | 2.000 |
TOTAL | 30.500 |
Le tableau 4 met en cause toute la bibliographie qui classe le Maroc à la troisième et quatrième place en matière de production.
7. L’EVOLUTION DES PRIX DE LA GOUSSE ET SES IMPACTS SUR LA FILIERE
a. Historique sur l’évolution du prix de la gousse
Avant la décennie 50 du siècle dernier, la grande partie des gousses de la caroube qui tombaient par terre au cours de l’automne était consommée par les ruminants. Les graines qui subissent un traitement de prégermination par les sucs gastriques, acidifiés, sont rejetées par les animaux et commencent à germer. Les plantules non consommées par les animaux étaient à l’origine de la régénération naturelle du caroubier au Maroc. Celles qui sont étêtées par le cheptel qui ont rejeté au niveau du collet ont donné des arbres naturels à plusieurs tiges qui ont la forme d’un taillis et qu’on rencontre fréquemment dans la nature. La première unité de concassage a été construite en 1952 par les autorités coloniales à Kénitra. Le prix de la gousse était compris entre 0,10 à 0,20 dh/kg. Au cours des décennies 60 et 70, le prix a passé à 0,50 dh puis 1,00 dh et 1,50 dh pour atteindre 3,00 dh au cours de la décennie 80 du siècle dernier. Cette décennie 80 a connu un tournant pour la filière par la construction des premières unités marocaines de transformation (1982) et la vente des productions de la forêt domaniale par l’Administration des Eaux et Forêts, le prix est monté à 4,00 dh/kg. Les productions des terrains privés étaient vendues au même prix à l’adjudicataire du lot domanial. Au cours de la décennie 2.000 le prix de la gousse a triplé pour atteindre 15,00 à 16,00 dh/kg suivant le rendement en graines. La décennie 2010 a connu un doublement du prix (30,00 à 32,00 dh/kg. En 2021, le prix a monté entre 70,00 à 80,00 dh/kg ce qui a été traduit par l’augmentation du prix de la graine à l’international à 32.000 Euros la tonne en mars 2022, suivi d’une baisse en mai 2022 de 7.000 Euros/tonne (vendu à 25.000 Euros/T) et une autre en juin 2022 (vendu à 22.000 Euros/T) pour se stabiliser en aout 2022 à 20.000 Euros/T. Malgré la chute de production en 2022 de plus de 50 % (30.000 T), l’importation de grande quantité de gousses (8.400 T) a mis en cause la renommée de notre produit, et les gommiers se sont depuis abstenus à contracter des livraisons avec nos concasseurs. Les prix ont chuté pour atteindre 10,00 dh/kg, soit un prix de la graine pour un rendement de 20% de 50,00 dh/kg au moment où le prix des dernières cargaisons exportées au cours du mois de février 2024 était de 4.000 Euros.
b. Impact de l’évolution des prix sur les producteurs
Devant la hausse des prix de la gousse, durant la décennie 90 (5,00 dh/kg), les grands producteurs se sont réveillés et ont manifesté le désir de procéder à la vente de leurs produits directement aux concasseurs. Pour leurs permettre l’obtention du permis de colportage, l’administration des Eaux et Forêts a procédé à l’application de la loi sur l’exploitation de bois particulier pour la récolte du caroubier se trouvant sur les propriétés privées. Cette loi prévoit pour les propriétaires de forêts privées qui désirent exploiter leurs forêts de faire une demande sous couvert de l’autorité locale et payer une redevance de 500,00 dh pour avoir la décision d’exploitation. Cette pratique s’est heurtée à deux contraintes majeures :
- Les propriétaires qui ont généralement hérité leurs parcelles ne possèdent pas d’actes de propriété leurs permettant de justifier leurs possessions.
- Les propriétaires qui possèdent deux ou trois arbres ne peuvent pas payer la taxe de reconnaissance de 500,00 dh. Le prix de vente des produits ne justifie pas le paiement de la redevance et les dépenses qui découlent du suivi de dossier.
Devant ces contraintes l’Administration des Eaux et Forêts a supprimé la taxe de reconnaissance de 500,00 dh en 2005.
Des conflits et litiges sont devenus quotidiens entrent les producteurs privés et les adjudicataires des lots forestiers sur l’origine de la caroube (forêt domaniale ou parcelle privée). Ces contraintes ont poussé les producteurs à s’unir en coopératives et en unions de coopératives, du moins dans la région de Beni Mella- Khénifra où actuellement plus de 50 coopératives, trois unions de coopératives et deux associations régionales (producteurs et transformateurs) ont été créées.
Actuellement, les coopératives envoient leurs demandes de récolte (une demande par coopérative) à la Direction Provinciale des Eaux et Forêts au cours du mois d’avril pour recevoir à temps la décision permettant la récolte et le colportage des produits. Des conventions ont été passées entre l’Agence Nationale des Eaux et Forêts (ANEF) et les coopératives pour récolter, à un prix symbolique, la caroube des forêts domaniales dont les adhérents bénéficient des droits d’usage. En contrepartie, les coopératives procèdent à la surveillance de la production forestière jusqu’à maturité et au greffage des arbres mâles en forêt.
c. Impact de l’évolution des prix sur les investisseurs
La chute des prix de la caroube au cours des deux dernières campagnes a poussé les investisseurs dans les plantations à changer de filière. L’augmentation des prix de l’olive au cours de cette campagne a encouragé le choix de l’oléiculture pour un grand nombre. Ceci a lésé les pépiniéristes qui ont tablé sur de grandes superficies de plantation par la production de grandes quantités de plants de caroubier greffé ce qui a eu pour conséquence la chute des prix de plants.
En ce qui concerne l’industrialisation le Maroc comptent plus de 36 concasseurs, dont au moins 18 sont fonctionnels, 3 unités de production de gomme et 6 unités de torréfaction de la pulpe. La construction d’un concasseur et d’une unité de production de gomme dans la Province de Nouaceur et d’un concasseur dans la Province d’Essaouira est en cours. Force est de constater que la pulpe de la caroube, dont la production moyenne annuelle est de l’ordre de 54.000 T à 56.000 T constitue un ingrédient indispensable pour l’alimentation animale des ruminants. Le stock de gousses (non vendu) au cours des deux dernières années a eu pour conséquence la hausse des prix de celle-ci, qui étaient de 1,20 dh à 1,50 dh/kg avant 2021, et qui sont passés à plus de 3,00 dh/kg, ce qui engendré la hausse des prix de l’alimentation animale.
8. CONCLUSION
La caroubiculture est une filière prometteuse et répond aux objectifs de la stratégie Génération Green (GG) et aux 17 objectifs du développement durable en matière de résistance aux CC et participation à l’équilibre socioéconomique de la population de montagne.
La stratégie GG prévoit la plantation de 125.000 ha d’ici 2030. Les plantations à venir doivent prendre en considération l’aspect physiologique et phytosociologique de l’espèce, ainsi que les exigences de l’espèce (xérophile, thermophile et héliophile) par sa plantation en mélange avec d’autres espèce à feuilles caduques ou buissonneuses. L’aspect agro écologique du caroubier permet la réalisation de plusieurs productions sur la même parcelle (aviculture sur parcours, apiculture, maraichage, et cultures hydroponiques, sandponique et aquaponiques).
Enfin, la technique de plantation, la densité, l’âge des plants les techniques culturales doivent être revues par la prise en compte des impacts des CC sur l’agriculture en général. Les techniques appliquées actuellement (copier-coller) de l’Espagne n’auront pas d’avenir.
L’installation des parcs à bois d‘arbres élites, producteurs de graines pour la production de porte greffes ou de greffons pour la production de plants répondant aux buts poursuivis (production de graines ou de pulpe) doivent faire l’objet de recherches immédiates. Pour se faire une cellule rassemblant les professionnels (associations et coopératives) et les chercheurs dans le domaine relevant de tous les instituts (INRA, IAV, ENAM, diverses facultés, …) doit voir le jour.
Il est temps également de soustraire la caroube de la législation forestière qui constitue un grand fardeau pour l’agriculteur. En effet, le caroubier forestier ne représente pas 15% de point de vue superficie et ses graines constituent une impureté pour le produit à l’export du fait qu’elles sont récoltées par les bergers avant maturité. La réalisation du PMV et GG, combinée avec le greffage des arbres males sur terrains privés réduira le pourcentage de la superficie forestière occupée par le caroubier, par rapport à la superficie totale, à néant. Pour rappel, la modification de la loi forestière, incluant le caroubier, effectuée par le protectorat français, a été faite à la fin des années 40 pour satisfaire ses intérêts économiques.
Par ailleurs, les unités de production de la gomme ont une capacité de l’ordre de 5.400 T/an soit 50% de la production actuelle. Avec l’entrée en production des plantations réalisées dans le cadre du PMV, du plan GG et des arbres mâles naturels greffés, la production connaitra une augmentation de 400%, L’encouragement des investissements relatifs à la transformation locale des sous-produits de la caroube (gomme, pulpe, germe…) s’avère nécessaire.
Photo 1 : Divers gâteaux à base de la pulpe de caroube sans sucre, sans cacao et sans beure
Photo 2 : Fructification du caroubier (source EDDABBEH 2022)
Photo 3 : caroubiers plantés sur terrasses pour lutter contre l’érosion pluviale.