Par Jérôme Barbaron, Président de CropLife Afrique Moyen-Orient
Ces dernières années, l’agriculture a attiré une attention significative lors de discussions de haut niveau sur le changement climatique. Le Sommet sur le Climat et le Sommet sur les Systèmes Alimentaires en Afrique, qui ont tous deux eu lieu en septembre, ainsi que d’autres plateformes similaires, ont justement souligné l’importance des pratiques agricoles durables pour atténuer le changement climatique. Alors que l’Afrique a le potentiel de nourrir le monde et elle-même grâce à ses vastes terres arables, les températures en hausse, les événements météorologiques extrêmes, les ravageurs et les maladies des plantes laissent des millions d’Africains souffrir de la faim et de la malnutrition.
Selon un rapport de la CNUCED de 2022, près de 60 % de la population du continent africain souffre d’insécurité alimentaire. De plus, le taux alarmant d’inflation aggrave cette situation précaire, rendant encore plus difficile l’accès à une nourriture abordable et nutritive. Par conséquent, dans le contexte actuel du changement climatique, comment concilier la nécessité urgente de passer à des systèmes alimentaires durables tout en libérant le potentiel agricole de l’Afrique et en garantissant ainsi que les Africains puissent se permettre trois repas par jour ?
La FAO estime que[1], pour satisfaire la demande croissante due à la croissance de la population et aux changements alimentaires, la production alimentaire devra augmenter de 60 % d’ici 2050, ce qui peut notamment être atteint grâce à l’utilisation de produits de protection des plantes (c’est-à-dire, des pesticides et des biopesticides) reconnus pour leur rôle à long terme dans l’agriculture durable et dans la garantie de la sécurité alimentaire. Comme cela doit être réalisé sans compromettre nos écosystèmes ni compromettre la santé et la sécurité de nos citoyens, il est essentiel de reconnaître que la voie vers une agriculture durable implique une combinaison d’avancées technologiques, de réformes politiques et d’efforts collaboratifs. C’est dans ce contexte que, jusqu’à présent, CropLife Afrique Moyen-Orient a lancé le Cadre de Gestion Durable des Pesticides (ou ‘Sustainable Pesticide Management Framework’, SPMF) dans deux pays agricoles importants de la région : le Kenya en 2021, et le Maroc en 2022, servant d’outil essentiel pour relever ces défis interconnectés du changement climatique, des systèmes alimentaires durables et de l’insécurité alimentaire. Le #SPMF est un engagement proactif et à long terme sur 5 ans pour lequel plus de 13 millions de dollars sont investis par l’industrie. L’ambition principale du SPMF est de protéger la santé humaine, de préserver l’environnement et d’optimiser la productivité agricole. Il repose sur trois piliers : réduire la dépendance aux #pesticides hautement dangereux[2], stimuler l’#innovation, garantir une utilisation responsable et efficace des solutions de #protection des #plantes.
Je suis très fier de noter que, tant au Kenya qu’au Maroc, le SPMF a déjà démontré des changements, notamment en ce qui concerne l’adoption accélérée de produits à faible risque, l’introduction d’innovations dans l’agriculture et, grâce à des programmes de formation et des ateliers, l’autonomisation des agriculteurs avec les compétences et les connaissances nécessaires pour adopter des pratiques agricoles durables. La mise en œuvre réussie du SPMF jusqu’à présent est possible, notamment grâce à deux ingrédients clés : la localisation du SPMF – les systèmes agricoles de l’Afrique varient considérablement d’une région à l’autre, il est donc impératif que les stratégies de transition verte soient adaptées aux contextes locaux – et l’approche collaborative. En effet, des efforts coordonnés avec les acteurs clés tout au long de la chaîne d’approvisionnement alimentaire sont essentiels, et en travaillant ensemble, des agriculteurs aux chercheurs, aux décideurs politiques et à d’autres décideurs, nous pouvons créer un secteur agricole durable et résilient qui non seulement augmente la productivité, mais aussi préserve le bien-être de nos communautés et de notre environnement.
Cependant, il reste encore beaucoup à faire. À l’approche de la COP28, il est important de rappeler les éléments suivants :
- Il est d’une importance capitale que les conversations des dirigeants se concentrent sur la recherche de l’équilibre entre la transition vers des systèmes alimentaires durables, la garantie de la sécurité alimentaire et la préservation des moyens de subsistance des agriculteurs.
- La réalisation d’un secteur agricole prospère, capable de nourrir une population africaine qui devrait doubler d’ici 2050, tout en atteignant les objectifs de durabilité, nécessite :
- des cadres législatifs appropriés favorisant l’innovation agricole ;
- des stratégies de transition verte adaptées aux contextes locaux ;
- le retrait des pesticides illégaux du marché, responsables de la mort de millions de personnes chaque année ;
- des actions conjointes pour réduire les risques potentiels associés à l’utilisation des pesticides, ainsi que des partenariats publics-privés.
Comme nous ne pouvons pas nous permettre de tarder à agir, saisissons cette opportunité pour renforcer la collaboration, apporter des changements significatifs et avoir un impact durable sur l’avenir de l’agriculture en Afrique.
[1] https://www.fao.org/3/i5188e/I5188E.pdf
[2] The International Code of Conduct on Pesticide Management defines Highly Hazardous Pesticides (HHPs) as: pesticides that are acknowledged to present particularly high levels of acute or chronic hazards to health or environment according to internationally accepted classification systems such as WHO or GHS or their listing in relevant binding international agreements or conventions. In addition, pesticides that appear to cause severe or irreversible harm to health or the environment under conditions of use in a country may be considered to be and treated as highly hazardous. https://www.fao.org/pesticide-registration-toolkit/special-topics/highly-hazardous-pesticides-hhp/introduction/en/
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