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Stockage des fruits : quelles sont les bonnes pratiques ?

Le stockage est une période très sensible pour les fruits à pépins. Ils peuvent être touchés par toute une série de maladies de conservation, souvent transmises avant la récolte, mais aussi pendant le stockage. Les bonnes pratiques agricoles permettent de limiter l’impact tant qualitatif qu’économique de ces maladies. 

[dropcap color=”#” bgcolor=”#” sradius=”0″]M[/dropcap]ême si les fruits paraissaient sains à la récolte, des maladies de conservation peuvent se déclarer pendant l’entreposage. En effet, de nombreuses maladies comme la pourriture lenticellaire, la pourriture grise, la moniliose…, résultent de contaminations réalisées au verger, pendant la période de croissance des fruits ou lors de leur cueillette. Les pommes sont ainsi presque toujours contaminées par les spores des champignons. La seule exception est réalisée par le passage du mycélium d’un fruit à un autre lorsque ceux-ci sont en contact direct. De telles transmissions s’observent dans les caisses à pommes lors d’infections causées principalement par Phytophthora syringae, Botrytis cinerea et Monilia fructigena.

L’arbre lui-même joue le rôle de réservoir pour la plupart des maladies de conservation. Certains champignons vivent en parasites sur les pommiers, provoquant des chancres sur les branches et les rameaux (Cylindrocarpon mali), tuant des bourgeons et des fleurs. D’autres espèces sont saprophytes et colonisent les tissus morts des cicatrices pétiolaires et pédonculaires, les bourses, les plaies de taille et les gélivures (Phlyctaena vagabunda). En fin, d’autres champignons tels les Phytophthora spp. vivent dans le sol ou à sa surface, sur des débris de l’arbre: feuilles mortes, fruits tombés, bois de taille (Botrytis cinerea, Cylindrocarpon mali).

L’eau de ruissellement est le principal agent de la dissémination des spores des champignons de conservation. Par exemple, les propagules de Phytophthora (spores et fragments de mycélium) sont entraînées par les éclaboussures de terre qui rejaillissent sur les fruits lors de fortes averses ou d’arrosages. Les parasites de blessures peuvent envahir les fruits chaque fois que leur épiderme est endommagé.

La période de contamination des pommes par les parasites latents est déterminée par le mode de pénétration. Les champignons dont les spores pénètrent par les lenticelles (Phlyctaena vagabunda) sont en mesure d’envahir les fruits dès que ces organes sont formés et jusqu’à la cueillette. Les infections de Botrytis cinerea, parasite de l’œil, ont lieu en fin de floraison. Les parasites pédonculaires germent sur la nécrose laissée à l’extrémité du pédoncule lors de la récolte. Les contaminations des pommes par Phytophthora syringae se réalisent à partir du début d’automne, lorsque la température au niveau du sol descend en dessous de 15° C.

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Quelques recommandations pour améliorer la conservation

Choix variétal

Toutes les variétés de pommes n’ont pas les mêmes aptitudes à la conservation. Certaines comme la Pink Lady sont sensibles au Gloéosporium et d’autres beaucoup moins (Gala). Le profil variétal disponible actuellement est très varié avec même des variétés ayant des qualités très intéressantes en matière de conservation.

Conduite du verger

Un verger bien aéré et dans lequel la lumière pénètre rapidement défavorise le développement des pathogènes. La taille et la gestion de la vigueur sont des pratiques qui influent positivement sur l’aération du verger. Certains arboriculteurs ont recours à des régulateurs de croissance qui limitent significativement le surplus de végétation. Au contraire, les filets limitent la circulation de l‘air et favorisent plutôt le développement des champignons, tout comme la présence de haies.

Des essais impliquant des produits osmoprotecteurs à base de glycine-bétaïne purifiée à appliquer au verger 30 jours avant la récolte, sur fruits à pépins et fruits à noyaux, ont donné de bons résultats. Ce type de produit a une action limitative des portes d’entrée (microfissure de l’épiderme des fruits), améliore la fermeté (régule la pression osmotique dans la cellule) et permet ainsi, sans action fongicide, d’améliorer l’aspect des fruits et leur tenue après la récolte.

Maîtrise de la maturité 

Pour conserver toutes les qualités du fruit lors de la phase de stockage, il est important de le récolter à sa juste maturité.

– Trop tôt, le fruit aura tendance à brunir à cause d’un phénomène d’oxydation : la Golden et la Granny Smith sont sensibles à ce phénomène dépréciatif. On parle d’échaudure de prématurité, intervenant souvent après 2 à 3 mois de conservation. Le stockage en atmosphère en teneur faible en oxygène pallie ce phénomène physiologique.

– Trop tard, les fruits deviennent plus vulnérables aux attaques cryptogamiques.

Réduire les risques à la récolte

Afin de limiter le développement des maladies de conservation, il est important de réduire les risques de blessures et meurtrissures lors de la cueillette, mais également lors du conditionnement :

– Un tri avant l’entrée en station consiste à éliminer les fruits blessés. Choisir les meilleurs fruits même imparfaitement mûrs (ils poursuivront leur mûrissement un fois cueillies). Peau lisse, exempte de nécroses sont des gages de bonne conservation.

– la manipulation soigneuse des fruits.

– Les traitements de pré-récolte sont à raisonner en fonction de la durée supposée de conservation, des conditions climatiques de la saison (grêle, fin d’été pluvieux) et de la pression de maladies en verger.

– Le nettoyage et la désinfection du matériel de stockage et entreposage (caisses, palox, calibreuse) et du local frigorifique limitent les foyers d’infections et de propagation.

 

Maîtriser les conditions de stockage

  • Le temps d’exposition des fruits après récolte à des fortes températures doit-être limité au maximum (encore plus vrai pour la poire). Afin de stabiliser le métabolisme des pommes, une mise à température modérée dès l’arrivée à la station est conseillée avant la mise au frigo. Cette baisse de température à l’intérieur du fruit influent directement sur le maintien de l’homogénéité de sa qualité tant gustative que nutritionnelle.
  • Choix de la température de stockage : la variété à conserver, sa maturité avant stockage, la durée de conservation sont autant de facteurs à prendre en compte dans le choix de la température de stockage
  • Maîtriser l’atmosphère de la chambre de stockage : la pomme est un fruit dit climactérique, c’est-à-dire que sa maturation est dépendante de l’éthylène qui agit comme une hormone de maturation. La ventilation du local limite l’accumulation d’éthylène freinant ainsi l’évolution de la maturité du fruit pendant le stockage.
  • Maîtriser l’atmosphère de la chambre de stockage : tendre vers la barre de 1% de O2 (contre 2 à 3% habituellement) permet, en associant une réfrigération adéquate, de préserver les fruits pendant 4 à 6 mois, voire 10 à 12 mois. A noter qu’un fort taux CO2 peut être responsable de pourriture du cœur de la pomme. Des abaques de bonnes conditions d’atmosphère de stockage existent en fonction des variétés à conserver et de la durée de conservation.
  • Contrôler régulièrement les fruits stockés et enlever les fruits abîmés.

Lutte contre les principales maladies

Gloeosporioses

Il s’agit de parasites latents, qui entrent par des portes d’entrée naturelles (lenticelles), et qui entrainent des pourritures qui constituent la principale source potentielle de pertes en conservation pour les pommes. La maladie des taches lenticellaires justifie, pour les variétés qui y sont sensibles et destinées à la longue conservation, des traitements de pré-récolte, voire de post-récolte. La lutte se réalise à deux niveaux :

– application d’un fongicide avant cueillette : alternant les substances en fonction de leur délai avant récolte, du nombre d’applications autorisé, allant habituellement de 3 à 4 semaines à 3 jours avant la récolte.

– après la récolte : trempage des fruits dans un bain contenant un produit anti-fongique adapté. 

Penicillium expansum 

Parasite de blessure qui provoque une pourriture claire très humide, avec une moisissure de couleur bleue ou verdâtre en surface. Il attaque le fruit blessé lors de la cueillette ou la manipulation en post-récolte, principalement en station fruitière (chambres froides, palox, drencher et bains des calibreuses…), l’inoculum étant largement présent dans l’atmosphère des chambres froides.

Du fait que beaucoup de souches ont développé des résistances au thiabendazole, la stratégie de lutte doit reposer essentiellement sur la prophylaxie :

– Réduire les risques de blessures et meurtrissures sur fruits par une cueillette soignée, le respect des dates de récolte, et un contrôle régulier des chaînes de calibrage.

– Eliminer les fruits blessés avant entrée en station et supprimer les fruits pourris des abords de station.

– Nettoyer et, si nécessaire, désinfecter les chambres froides, les palox et le matériel de récolte et de conditionnement, les calibreuses.

– Changer régulièrement les bains des calibreuses à convoyage liquide. La filtration des eaux est efficace sur les spores de Penicillium véhiculées.

Botrytis

Sur pomme et poire il est surtout parasite de blessure. La contamination peut avoir lieu dès la floraison (Botrytis de l’œil), et peu avant la récolte, où il se développe ensuite en conservation. Au verger, il est recommandé de réduire les sources d’inoculum et protéger les plaies de taille avec des produits cicatrisants. Dans les parcelles à risque et si les conditions d’humidité de l’air sont favorables, intervenir chimiquement d’une manière préventive au stade G-H. En conservation les traitements de post-récolte sont peu efficaces, privilégier les interventions de pré-récolte et la prophylaxie.

Moniliose :

Causée par un champignon parasite qui pénètre via les blessures et qui est responsable de dégâts au verger et en conservation. La pourriture se développe rapidement, dès les premiers mois de stockage et peut, par contact, générer des points de pourritures sur des fruits sains. Les mesures prophylactiques consistent à supprimer les sources de contamination en évitant de laisser au sol les fruits momifiés, ou en les détruisant par broyage avec les feuilles à l’automne (prophylaxie tavelure) à protéger les plaies (grêle, taille…) et à ne pas rentrer de fruits blessés en chambre froide. Certains types de filets utilisés contre le carpocapse, empêchent également l’accès des oiseaux et insectes aux fruits, et limitent ainsi les causes de blessures.

Certains produits fongicides autorisés en pré-récolte sont efficaces sur le Monilia aussi bien pour la maladie au verger que pour celle en conservation. Certaines spécialités commerciales utilisées contre la tavelure et l’oïdium freinent également le développement des monilioses. 

La bonne utilisation de fongicides adaptés réduit considérablement le risque de développement de ces moisissures. Certains produits présentent un large spectre d’efficacité contre un grand nombre de ces maladies de conservations.

A noter qu’il existe des produits à base de souches de levures antagonistes, comme Candida oleophila, homologuée contre Penicillium et Botrytis des pommes et de poires. Ils agissent par occupation de sites, en formant un biofilm protégeant les blessures.

 

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