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Haricot vert: les producteurs satisfaits des résultats de la campagne 2022/23

La période de production européenne de haricots varie selon les pays et s’étale généralement du 15 juin au 15 octobre. Le Maroc, l’un des principaux fournisseurs de ce marché en contre saison, a réussi à étendre considérablement sa période de production grâce à des cultures sous serres de différents types de haricots. Il est pratiquement présent tout au long de l’année, avec des volumes moindres à certaines périodes.

Bénéficiant d’atouts indéniables, Agadir est la première région de production de haricot, mais certains producteurs disposent également de terrain dans le nord du pays, qu’ils exploitent pendant les mois d’été. Le calendrier de production peut s’étaler sur toute l’année, mais le plus gros de l’export est concentré entre octobre et juin. L’essentiel des exportations est destiné au marché européen, notamment l’Espagne pour le haricot plat, et la France et les Pays-Bas pour le haricot filet. A noter que moins de surfaces ont été consacrées cette année au haricot en raison de la disponibilité limitée en eau.

M. Mourad chakir, consultant technique bénéficiant d’une longue expérience dans la gestion de différentes cultures maraichères, a bien voulu partager avec nous son avis sur les faits qui ont marqué la campagne 2022/23 pour les trois types de haricots cultivés dans la région du Souss.

Haricot type helda

Le haricot plat se cultive en deux cycles : le premier en hiver avec des semis effectués d’octobre à mars et un rendement moyen de 25 à 30 tonnes par hectare (T/Ha), et le second en été (semis en avril, mai et juin), moins productif, ne dépassant pas 14 à 16 T/Ha.

Sur le plan commercial, et selon les professionnels interrogés, la campagne a été exceptionnelle pour les producteurs de haricot en raison des bonnes récoltes et des bons prix. Ces derniers ont atteint un niveau élevé de 30 Dh/kg, avec une moyenne de 25 Dh/kg pour les productions d’été (faible production, mais prix élevé). En ce qui concerne le cycle d’hiver, la moyenne était de l’ordre de 15 Dh/kg, mais compte tenu de l’importance de la production à certaines périodes, les prix ont chuté jusqu’à 4 Dh/kg. Globalement, compte tenu de la demande élevée et de la faible superficie cultivée, il n’y a pas eu de difficultés pour la commercialisation de la production. A souligner toutefois qu’en Espagne, pendant la semaine sainte, les prix ont fortement chuté en raison de la faible demande de la part des ménages espagnols, une chute qui s’est prolongée pendant 2-3 semaines.

Chacun des deux cycles de production présente des avantages, mais aussi des défis. En hiver par exemple, plus la température est basse plus la pollinisation se fait mal et le pourcentage de fruits déformés augmente. On peut même assister à des chutes de fleurs. Par ailleurs, plus l’hygrométrie est élevée plus les conditions sont favorables à l’installation des maladies fongiques, notamment la pourriture grise, l’alternaria, l’anthracnose et l’oïdium. En été, le premier problème de la culture est le TYLCV, virus transmis par la mouche blanche, et qui affaiblit la plante et la rend très sensible aux attaques fongiques. De même, les cultures d’été subissent de fortes attaques des acariens, de l’oïdium et du virus de la mosaïque du haricot (SBMV).

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Haricot de type filet :

Le haricot de type filet est principalement produit durant le cycle d’hiver à partir du 15 octobre. Sa récolte débute en décembre, puis la production du type Helda, qui résiste mieux à la chaleur, commence. A noter que ce type de haricot requiert une main-d’œuvre plus importante que le type Helda, et son principal marché est la France. Les résultats de la campagne pour le haricot filet est bonne, surpassant ceux du type plat.

Haricot Perona:

Très demandé par les espagnols, le haricot type Pérona (semi-large) est caractérisé par sa forme plate et courte, ne dépassant pas 14 à 16 cm, et son bon rendement, supérieure de 5 T/Ha à celui du type Helda. Son prix de vente est également plus élevé. Sa production est principalement réalisée en hiver, à partir de la mi-octobre.

D’après les observateurs, la culture du haricot et du poivron sera la tendance pour l’année prochaine, compte tenu des mauvais résultats obtenus cette année pour la tomate et la framboise. Rappelons que la précédente campagne haricot avait été jugée catastrophique pour le haricot, avec l’instauration du quota, qui a réduit les volumes exportés, en plus de nombreuses contraintes (aléas du climat, faible rendement, prix bas, maladies…), ce qui avait poussé beaucoup de producteurs à abandonner cette spéculation, au profit des fruits rouges, alors que d’autres avaient préféré louer leurs fermes.

Diversifier les débouchés

La part de la production destinée à l’exportation représente 80% des volumes de haricot filet et 100% de haricot plat. Les volumes réservés à l’industrie et au marché local sont donc très limités. Les années où le marché européen n’est pas demandeur, les producteurs de haricot plat ont beaucoup du mal à écouler leur production localement vu qu’il n’y a pas un marché local pour ce produit et que sa consommation est faible principalement à cause de la mauvaise qualité habituellement proposée au consommateur marocain. En effet, généralement ce sont les écarts de triage (gousses sèches et jaunes) qui sont vendus localement, d’où le manque d’engouement pour ce produit.

Pourtant, le développement de la consommation locale des haricots plats offrirait la garantie de la continuité du secteur et sa pérennité. Des professionnels pensent que, pour ouvrir de vraies perspectives aux producteurs, il serait beaucoup plus intéressant de faire connaitre le produit ‘’Haricot plat’’ et les manières de le cuisiner aux consommateurs marocains. Dans un pays de 40 millions de personnes et en supposant que le 1/10 seulement des marocains va consommer 1 kg/semaine, on peut atteindre facilement en une année une consommation 3 fois supérieure à la quantité exportée actuellement. Reste à réfléchir sérieusement aux moyens qui permettent d’atteindre ces objectifs. 

Quelle variété choisir ?

Comme l’explique M. Hachmi Garmah, responsable de développement Bejo Maghreb, aujourd’hui, pour pouvoir répondre aux exigences du marché, les producteurs recherchent des variétés qui peuvent offrir le meilleur compromis entre plusieurs critères :

– Adaptation aux conditions climatiques,

– Facilité de germination pour réduire les frais de pépinière, 

– Plantes moyennement végétatives pour économiser la main d’œuvre et tolérer les hautes densités,

– Nécessitant moins d’intrants,

– Meilleurs rendements,

– Plus de productivité surtout en période de froid avec un cycle plus allongé,

– Bonne qualité constante pendant le cycle pour satisfaire un consommateur de plus en plus exigeant (longueur, couleur, gousses indemnes de maladies…),

– Une longue conservation pour conquérir des marchés lointains,

– Résistances multiples aux maladies virales et aux nématodes : avec le retrait continu des matières actives et les exigences des clients, la résistance génétique est un allié incontournable pour lutter contre ces agents pathogènes.

– Bonne résistance au SBMV.

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Contraintes de la production dans le Souss

Force est de constater que le haricot n’est plus cette culture facile que l’agriculteur peut produire dans des serres anciennes, mal équipées et une gestion moyenne. Aujourd’hui, le producteur marocain doit faire face à une multitude de contraintes pour la réalisation d’une production exportable répondant aux normes internationales :

– qualité et fraicheur irréprochables,

– ponctualité des livraisons,

– respect des engagements préalables en termes de volumes, or l’offre connait souvent de sérieuses fluctuations en fonction du climat,

– restrictions sur les traitements phytosanitaires : la monoculture de haricot l’a rendu sensible à diverses maladies et virus. Face à cette pression parasitaire, l’interdiction de plusieurs matières actives et les exigences drastiques des chaines de distributions européennes constituent un sérieux handicap pour le producteur qui doit protéger efficacement sa production tout en assurant un produit irréprochable en termes de résidus de pesticides.

– traçabilité sans faille du produit,

– multitude de certifications spécifiques, afin de répondre aux exigences des consommateurs et des chaines de distribution européennes, avec tout ce que cela impose en termes de documentation, audits et charges.

La production de haricot dans la région du Souss connait plusieurs contraintes agronomiques liées au mode de conduite intensif sous serre. Suite à la succession de la même culture sur les mêmes parcelles, les sols deviennent fatigués, pauvres en matière organique et leurs paramètres physico chimiques ne conviennent plus à la culture des haricots. Par ailleurs, le pH des sols est devenu très basique, ce qui ne permet pas une absorption optimale des éléments nutritifs par les plants. Les producteurs sont ainsi contraints lors de chaque fertigation à veiller à corriger le pH du sol.  Des professionnels pensent que le développement de la culture hors sol pourrait apporter des solutions pour un certain nombre de contrainte physico-chimiques liées à la fatigue des sols. Il permettrait aussi de réduire la pression de certains ennemis de culture.

Le deuxième problème est l’état d’infestation des sols par les nématodes très actifs dans les sols sablonneux et par temps chaud, causant des chutes de production considérables. La désinfection des sols au fil des années a fait que les sols sont devenus très pauvres en microorganismes. Ce ne sont plus des milieux vivants mais juste un support de culture stérile. Les producteurs ont ainsi intérêt à favoriser l’activité biologique des sols pour assurer la pérennité de leur activité. Des solutions existent actuellement et il suffit de se faire conseiller par les entreprises spécialisées.

En plus des ennemis de culture, le manque d’eau dans la région du Souss constitue un gros problème qui a entraîné une diminution de la superficie cultivée et une hausse des charges.

Par ailleurs, le haricot est une culture très gourmande en main d’œuvre, surtout au moment de la récolte qui devient une tâche de plus en plus compliquée et coûteuse. La main d’œuvre devient un facteur limitant surtout entre les mois de décembre à mars, période de pic des récoltes des fruits rouges dont les superficies n’ont cessé d’augmenter au cours de ces dernières années dans le Souss. En effet, les ouvriers privilégient les emplois dans le secteur des fruits rouges, qui offre des rémunérations plus motivantes et de meilleures conditions de travail. Cette pénurie de main-d’œuvre se traduit par un manque d’entretien de la culture à certaines phases clés, ce qui peut affecter les rendements. Par ailleurs, les ouvriers préfèrent travailler ‘’à la tâche’’, pour accomplir le travail rapidement et sans grande rigueur, ce qui entraîne de nombreux cas de casse et de pertes de la production. Le producteur déplore aussi le coût de cette main d’œuvre, avoisinant parfois le prix de vente du produit, sans oublier d’autres frais supplémentaires comme le transport. 

Sur un autre volet, les charges et les normes imposées à la production du haricot se sont considérablement alourdies, alors que les prix de vente du produit stagnent, voire baissent. Face à ces différentes contraintes, les superficies allouées au haricot tendent à diminuer ces dernières années.

Protection phytosanitaire

Elle doit permettre de produire un haricot répondant aux normes de qualité et respectant les normes résiduelles de pesticides. Elle doit être en adéquation tant avec la réglementation en vigueur dans le pays de production qu’avec les normes résiduelles des pays réceptionnaires du produit exporté. La lutte chimique doit être avant tout raisonnée. L’observation et la détection d’un seuil minimum doivent être prises en considération avant toute intervention à base de pesticides.

Pour rappel, les principaux ennemis des cultures du haricot dans le Souss sont : les nématodes, les maladies vasculaires (fusarium et verticillium), le TYLC, le SBMV (problème majeur). Les pertes de production peuvent atteindre dans certains cas jusqu’à 50% avec des fruits tachetés non commercialisables. Les autres ennemis rencontrés sur cette culture sont la pourriture grise, les pourritures du collet, l’oïdium, les acariens et le thrips.

« Pour prévenir l’attaque du virus Tylc pendant le cycle d’été, trois mesures essentielles sont recommandées par les professionnels, explique M. Mourad chakir. Tout d’abord, il est impératif de procéder au chaulage des serres afin de réduire l’activité des mouches blanches tout au long de la journée. Ensuite, il est recommandé d’installer des plaques jaunes dès le début de la culture pour piéger les mouches déjà présentes à l’intérieur de la serre et prévenir l’infestation par le virus Tylc. Certains producteurs mettent en place une bande en plastique (neuf) d’un mètre de largeur tout autour de la serre pour renforcer la sécurité et empêcher à 90% l’introduction des aleurodes à travers les petits trous (causés par les fils de fer…) ».

« Le virus de la mosaïque du haricot (SBMV) constitue également un sérieux problème car il survit dans le sol après l’arrachage des plantes. Il est donc recommandé par les spécialistes, en fin de culture, de couper la partie aérienne des plantes à 2 cm du sol et de laisser les racines mourir sur place, afin que le virus périsse avec elles, et éviter ainsi sa propagation dans la serre. Il ne faut surtout pas arracher les plantes infectées, contrairement au cas du Tylcv qui impose l’arrachage de l’intégralité du plant » conclut M. Chakir.

A noter que globalement, au fil des ans, les producteurs du Souss voient leur potentiel de production diminuer avec la monoculture (pas d’assolement, pas de rotation), les aléas du climat et le manque de choix variétal, d’où la répercussion directe sur le rendement. Sans oublier l’impact négatif du renchérissement continu des intrants, du prix du gasoil et de la certification. De même, les opérateurs du secteur se plaignent du manque d’intérêt accordé par la recherche au haricot, contrairement à d’autres espèces comme la tomate et les fruits rouges.

Fertilisation

Compte tenu du cycle court du haricot vert, le choix des formes d’engrais est important. La fertilisation doit être basée sur l’utilisation d’engrais dont les éléments sont rapidement et facilement assimilables. La particularité des plantes de la famille des légumineuses, dont fait partie le haricot, est de pouvoir fixer l’azote grâce aux nodules sur les racines. Si cela permet un apport non négligeable en azote, les apports complémentaires restent nécessaires pour obtenir un rendement commercial optimum.

La fertilisation sera raisonnée pour l’ensemble des éléments majeurs (N, P, K) et appliquée en partie avant la mise en culture (fumure de fond) et le solde au cours du cycle végétatif (fumure de couverture). Les apports d’oligo-éléments indispensables à la culture (molybdène, zinc, cuivre et manganèse) seront assurés au besoin par des pulvérisations foliaires, voire par le réseau d’irrigation au goutte-à-goutte.

La technique du goutte à goutte permet d’apporter la fumure de couverture en fractionnant les apports tout au long de la période de culture. Il convient d’être très rigoureux dans le choix et la qualité des engrais qui seront utilisés dans un schéma de ferti-irrigation, les risques d’obturation des goutteurs pouvant être préjudiciables à une bonne irrigation de l’ensemble des lignes et de la parcelle.

Récolte

La fréquence de récolte sera adaptée au type de haricot exporté. Pour le haricot extra fin, les récoltes se feront tous les jours. Pour le Bobby, une récolte tous les trois à quatre jours est conseillée et tous les deux jours pour le haricot filet. Il est nécessaire de garder ces fréquences de récolte tout au long de la production pour éviter de pénaliser les rendements commerciaux par des écarts de triage importants. Les produits seront récoltés manuellement et cueillis avec le pédoncule. Un soin particulier est nécessaire pour préserver la qualité de la récolte, à savoir :

  • Ne pas surcharger les caisses de récolte (risque d’écrasement) ;
  • Préserver la fraîcheur des produits en évitant de les laisser en plein soleil ;
  • Mettre les récoltes le plus rapidement possible en chambre froide, y compris avant le triage si ce dernier est différé.
  • Les récoltes se feront de préférence le matin, sauf si les plantes sont humides.
  • Le personnel chargé de la récolte sera sensibilisé aux exigences qualitatives spécifiques à cette production. 

Conservation

Le haricot vert se caractérise par sa nature périssable et sa conservation nécessite une infrastructure d’entreposage frigorifique suffisante et appropriée. Des efforts importants ont donc été consentis dans ce sens par les exportateurs marocains afin d’améliorer sa productivité et sa qualité, et pouvoir ainsi répondre aux exigences des clients.

Il est impératif que les produits soient placés en chambre froide dès leur conditionnement. Il est vivement recommandé de respecter les températures de conservation minimales recommandées qui permettent au haricot vert de se conserver environ une semaine.

Outre la température, il convient de conserver les produits conditionnés dans une atmosphère d’humidité relative adéquate. Un excès d’hygrométrie peut provoquer des évolutions de gousse avec apparition de moisissures. Les produits conditionnés seront entreposés dans des chambres froides disposant d’une ventilation modérée pour éviter le desséchement des gousses.

Logistique

Les haricots doivent être acheminés le plus rapidement possible vers leur destination. Ils sont transportés par des camions frigorifiques qui prennent deux à trois jours via le port de Tanger jusqu’au marché de Perpignan par exemple.

La température et l’hygrométrie optimales doivent être respectées le long du trajet, et toute fluctuation peut causer un brunissement, d’abord sur les extrémités puis sur l’ensemble de la gousse. Il n’est d’ailleurs pas conseillé de transporter le haricot filet dans le même camion que la tomate ou d’autres produits qui n’ont pas les mêmes exigences de température et d’humidité relative.

Une fois le produit arrivé à destination, il est important de ne pas rompre la chaîne du froid pour préserver la qualité des haricots verts.

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