Après plusieurs années d’arrêt obligé en raison de l’état d’urgence sanitaire déclaré au Maroc depuis mars 2020, l’Association Marocaine de Protection des Plantes (AMPP) a pu enfin organiser son 12ème congrès le mardi 14 mars 2023, à l’endroit même qui a vu sa création il y a 30 ans, l’Institut Agronomique et vétérinaire Hassan II à Rabat. Fidèle à son habitude, l’AMPP a choisi une thématique d’actualité : « la protection phytosanitaire au Maroc face à l’émergence de nouveaux organismes nuisibles ».
Dans une ambiance studieuse habituelle, des participants de divers horizons, ont pris part à ce congrès notamment des enseignants chercheurs (#ENA de Meknès, #IAV Hassan II, #CHA, #INRA), des représentants des sociétés de protection des cultures, des producteurs, des doctorants, des étudiants ingénieurs, des consultants et des spécialistes en phytiatries des secteurs public et du privé.
Le choix pertinent du thème et la présence d’experts reconnus dans leurs spécialités respectives ont permis aux participants de mieux comprendre l’enjeu d’une meilleure connaissance des nouveaux ennemis des plantes menaçant nos cultures.
L’essor des échanges commerciaux par des moyens de transport de marchandises et de personnes, le changement de mode de production des cultures a engendré l’introduction non intentionnelle et parfois l’intensification d’espèces exotiques envahissantes et nuisibles en dehors de leur territoire. En plus, les changements climatiques ont aussi contribué à modifier la distribution, la phénologie et l’abondance de nombreux organismes nuisibles. L’émergence de tels #bioagresseurs dans un pays entraine souvent des pertes économiques considérables en raison des dégâts qu’ils causent aux cultures et de leur impact sur la #biodiversité, ainsi que les moyens qui doivent être mis en œuvre pour les éradiquer.
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Gestion de la cochenille du cactus
Cette intervention de l’INRA a donné une description succincte des connaissances acquises sur la taxonomie, la distribution, la bio-écologie et les stratégies de contrôle développées au Maroc et ailleurs vis-à-vis de la cochenille du cactus (Dactylopius opuntiae). En absence de moyens pour la contrôler, plusieurs tentatives ont été déployées pour éradiquer ce fléau. Les stratégies de lutte intégrée contre les ravageurs ont largement opté pour l’utilisation combinée des agents de contrôle biologique et des insecticides sans danger. Mais, au Maroc, la gestion de ce fléau repose essentiellement sur la résistance génétique du cactus à la #cochenille pour les nouvelles plantations chez les agriculteurs. Mais la vision de trouver d’autres solutions alternatives de lutte est nécessaire pour renforcer la reconstitution et le développement de la filière cactus et la réhabilitation des cultivars les plus appréciés par les consommateurs qui ont été décimés par la cochenille.
Piégeage de masse du Charançon Rouge du Palmier (CRP)
Un travail de recherche collaboratif entre l’ENA de Meknès et l’ONSSA a été réalisé, en vue d’améliorer l’efficacité du piégeage de masse contre le CRP au niveau de la Wilaya de Tanger. L’objectif étant l’enrayement de ce ravageur pour éviter sa propagation dans le reste du pays, notamment dans les oasis du sud.
Les essais d’amélioration de la qualité du piégeage de masse du CRP ont montré que les pièges de couleur noire sont les plus attractifs et que l’acétate d’éthyle (AE) n’a pas d’effet sur le taux de captures en été, car il s’évapore rapidement. Les adultes du CRP ont été efficacement piégés à 10 pièges/ha. Les pièges à phéromone attirent plus de femelles que de mâles, ce qui constitue un avantage à long terme pour le piégeage de masse.
En résumé, les captures des adultes du CRP résultent de nombreux facteurs en interactions complexes qui induisent des comportements basés sur l’intégration d’informations odorantes et visuelles.
Détection et lutte contre le CRP
La société marocaine « Smart Agriculture Leader » a développé un système intégré qui repose sur la détection précoce du CRP et le traitement localisé. Le système de détection est basé sur des senseurs capables de détecter la présence de larves du CRP dans le stipe du palmier. Les palmiers contaminés doivent être traités immédiatement par le système de traitement par endothérapie, pour stopper les dégâts des larves qui détruisent les tissus. Il s’agit d’un système d’injection de pesticides à basse pression qui propulse un insecticide à l’intérieur du stipe du palmier. L’endothérapie présente de nombreux avantages, parmi lesquels :
– détruire les larves dans le palmier avant qu’elles ne fassent des dégâts, évitant aussi la sortie des adultes,
– traiter uniquement les pieds contaminés avec réduction de l’impact économique et écologique,
– Eviter la contamination des dattes par les pesticides, comme cela peut arriver avec les traitements foliaires intensifs et tardifs.
Des tests de ce système sont initiés dans la région de Tanger sous le contrôle de l’ONSSA.
La chenille légionnaire d’automne
Des experts de la FAO ont analysé les données rapportées dans la littérature pour essayer d’évaluer les risques d’entrée et de dissémination de ce ravageur au Maroc. La superposition des données sur les effets de la température sur le développement de l’insecte avec les températures de trois régions marocaines à risque montre que le Loukous et l’Oriental sont des zones à risque. Dans la région de Marrakech-Safi, il existe des niches temporelles, mais l’établissement de l’insecte est peu probable.
Le risque d’entrée pour le Maroc est élevé et le risque d’établissement est modéré vu la nature du climat du pays avec peu de niches favorables. Néanmoins, vu sa polyphagie et ses capacités d’adaptation rapportée dans différents pays, l’insecte peut développer des souches “type climat marocain’. D’un autre côté, comme il s’agit d’un ravageur qui a fait l’objet de beaucoup d’études, les méthodes de contrôle sont disponibles en cas d’invasion.
Xylella fastidiosa, acquis de la recherche
Cette bactérie est actuellement l’un des agents pathogènes de quarantaine sur lesquels les chercheurs du monde entier travaillent durement pour trouver des voies intéressantes pour empêcher sa propagation.
Cette autre communication de l’INRA a résumé les principales informations disponibles sur cette bactérie, sa diversité génétique et ses hôtes végétaux, ainsi que la reconnaissance de ses symptômes chez certaines espèces végétales importantes. Des analyses génomiques comparatives sont menées pour étudier l’interaction génome X. fastidiosa -hôte. De même, les connaissances sur la résistance de l’hôte à cette bactérie et l’identification de mesures potentielles pour y faire face ont également été rapportées.
Une fois cette bactérie établie dans une nouvelle région, sa propagation dépend de la transmission obligatoire par des insectes se nourrissant du xylème. La connaissance des espèces se nourrissant de xylème est donc une étape importante pour prévenir les risques d’infection et de dissémination de la maladie en cas de son introduction.
Des travaux de l’INRA ont montré la présence au Maroc d’espèces se nourrissant de la sève xylemine des végétaux. Elles peuvent de ce fait être candidates à la transmission de X. fastidiosa. Le fait qu’il y ait d’importants échanges de matériel végétal entre le Maroc et l’Europe, en particulier les pays où la bactérie existe, en plus de la similitude des vecteurs au niveau européen et national, peuvent constituer un risque majeur quant à l’introduction de cette bactérie dévastatrice.[images_grid auto_slide=”no” auto_duration=”1″ cols=”six” lightbox=”no” source=”media: 28006,28002,28003,28004″] [/images_grid]
Un répertoire « bioagresseurs »
Face à ces différentes menaces qui guettent l’agriculture Marocaine, et afin de sensibiliser tous les intervenants au niveau du secteur agricole, l’AMPP a élaboré un premier répertoire des bioagresseurs connus (Introduits et/ou actuellement existant sur le territoire national ou ayant été éliminés après introduction ou carrément stoppé à l’entrée du territoire). La consultation de ce répertoire permettra à tous les intervenants de rester vigilant et de disposer d’un référentiel (expériences vécues au Maroc et ailleurs) devant tout phénomène anormal qui toucherait une culture ou une spéculation végétale. Une invitation est d’ailleurs adressée à tous les chercheurs/enseignants/professionnels pour enrichir continuellement cette base de données qui sera ouverte et consultable dans le cadre de partage des connaissances et des expériences.
Il y a en effet un besoin manifeste de responsabilisation des producteurs et importateurs de plants pour qu’ils n’introduisent que des plants provenant de pépinières agréées et situées dans des zones officiellement reconnues indemne d’organisme nuisibles. L’exemple vécu avec la cochenille du cactus et le feu bactérien nous interpelle pour donner plus de moyens aux autorités compétentes chargées du contrôle aux postes frontaliers et à l’intérieur du pays afin de prendre les précautions et mesures nécessaires face à des ennemis souvent fortement dévastateurs pour des cultures stratégiques du pays.
Nouveau bureau pour l’AMPP
Lors de cette séance, l’ancien bureau a présenté les rapports moral et financier qui ont été approuvés à l’unanimité. Par la suite, il a été procédé à l’élection du nouveau bureau de l’AMPP pour une durée de deux années (2023-2025). Le nouveau bureau est composé comme suit :
NOM ET PRENOM |
FONCTION |
Mihi Mohamed |
Président |
Lbida Bouabid |
Vice-président |
DADI Abdelmalik |
Secrétaire générale |
CHTAINA Noureddine |
Secrétaire générale adjoint |
SAFFOUR Kaddour |
Trésorier |
HORMATALLAH Abderrahim |
Trésorier adjoint |
BENTATA Fatiha |
Assesseur |
ERRABHI Nabil |
Assesseur |
KOTBA Imad |
Assesseur |
BARAKAT Ilham |
Assesseur |
AITBAHADOU Smail |
Assesseur |