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EDITORIAL 121 :  L’agriculture biologique au Maroc

EDITORIAL

L’agriculture biologique au Maroc

Pourquoi la filière reste modeste malgré ses fortes potentialités

Concernant le bio au Maroc, les chiffres (qui trompent rarement) donnent à réfléchir : avec, en 2017-18, 9.850 ha réalisés sur les 40.000 prévus par le contrat programme de la filière pour 2020, soit moins de 25%. Les objectifs du PMV sont loin d’être atteints dans le domaine du bio. De même, la production a atteint 94.500 tonnes composée en grande partie de produits maraîchers, alors qu’on prévoyant 400.000 tonnes (moins de 24%). Les exportations également ont atteint difficilement 17.000 tonnes, soit 28% sur les 60.000 prévues. Parallèlement, le taux de croissance n’atteint même pas 5% par an et reste largement inférieur à des pays similaires (Tunisie, Turquie) ou à des pays européens qui atteignent 20%.

Pourtant le secteur connait une très forte demande aussi bien nationale qu’internationale. Pour s’en convaincre, il suffit de voir l’engouement des marocains pour les produits “naturels’’, sains, labellisés ou certifiés bio dans les nombreux salons ou magasins et rayons spécialisés ou autres points de vente. De même, la création d’associations de producteurs et de consommateurs ainsi que la multiplication de fermes bio et du nombre d’entreprises de vente directe aux consommateurs (circuits de proximité) confirment cette tendance. Cependant, la tenue du premier salon Bio expo Maroc dernièrement à Casablanca (voir page 14) a permis aux langues de se délier et de pointer les  handicaps et barrières qui entravent la croissance de cette filière prometteuse.

Pourquoi les objectifs du PMV n’ont pas été atteints?

C’est la question que se posent logiquement les professionnels dont certains estiment que l’objectif des 40.000 hectares n’était pas réaliste. Ensuite, et afin de se conformer aux normes nationales et internationales d’agriculture biologique relatives à la certification des produits, les agriculteurs doivent passer par une période de reconversion qui dure deux à trois ans selon que les cultures sont annuelles ou pérennes. Cette période consiste à conduire ces cultures en bio sans qu’elles soient certifiées (donc commercialisées comme conventionnelles) et ce afin d’éliminer toutes traces ou résidus d’intrants chimiques dans le sol. Au cours de cette période, il faut sensibiliser les producteurs, les former et accompagner leur transition vers le bio. Sans oublier les coûts liés à l’obtention du label Bio Maroc et aux différentes certifications nécessaires pour la commercialisation.

En outre l’agriculture biologique souffre de sa faible rentabilité, du manque d’encadrement des producteurs, de la difficulté de s’approvisionner en intrants homologués (importés pour la plupart), …

A l’instar d’autres filières, l’agriculture biologique souffre de la primauté accordée par le PMV à l’aspect extension des superficies et des tonnages produits sans accorder l’importance concomitante qu’il devrait donner à la commercialisation et aux marchés censés absorber ces productions

Par ailleurs, et même si la demande internationale en produits biologiques est soutenue, il ne faudrait pas compter sur l’export uniquement, mais également et principalement sur le marché intérieur qui reste la valeur sûre de toute croissance et développement du pays. Il faut souligner dans ce sens que consommer bio ne se limite pas à acheter de temps en temps un kilo de fruit ou de légume biologique ou même quelques produits du terroir à l’occasion de salons ou expositions diverses. Consommer bio c’est un mode de vie et de comportement. Développer ce secteur revient à prendre plusieurs mesures, notamment :

– des actions de promotion et de sensibilisation sur le long terme auprès des consommateurs

– mettre le produit bio à la portée du consommateur aussi bien en ce qui concerne les prix que la disponibilité (ne pas se limiter à des magasins spécialisés hors de portée … ),

– soutien aux producteurs pour limiter la hausse des prix inhérente à la production bio (baisse

des rendements, … )

– éviter la confusion entre produit certifié bio et produits “naturels”

– éviter confusion entre produits biologiques et produits “protégés biologiquement’’ ;

Il faut que tous les intervenants agissent pour que ce type de produits ne reste pas lié à un effet de mode, et ce n’est pas impossible.

Abdelhakim MOJTAHID

Directeur de publication

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