Quel impact le réchauffement a-t-il sur la flore ?
On sait que le réchauffement climatique transforme globalement les écosystèmes… Mais comment la flore s’adapte-t-elle concrètement ?
Simple : le réchauffement modifie les dates de germination, floraison, éclosion et hibernation des végétaux. Ce qui, en soi, n’est pas problématique : même décalé, le cycle végétal demeure. Oui, mais la flore est aussi liée au monde animal. Et c’est là que les choses se compliquent. Comme le résume une fable signée non pas de Jean de La Fontaine, mais du réchauffement climatique : celle du chêne, de la chenille et de la mésange.
Effets en cascade
Dans le même temps, la chenille de la phalène brumeuse (un papillon de nuit), qui se nourrit des feuilles de chêne, éclot elle aussi prématurément : deux à trois semaines plus tôt qu’auparavant. C’est que la chaleur accélère son métabolisme ! Or, en avance de quinze jours sur le chêne, la petite chenille ne trouve plus assez de feuilles pour s’alimenter. Résultat : sa population chute. Au grand dam du 3e personnage de cette fable, la mésange charbonnière, qui mange les chenilles.
Car moins affectée par la hausse des températures, celle-ci pond ses œufs normalement au jour J. Sauf que, désormais, les chenilles manquent pour nourrir ses oisillons. A tel point qu’elle et la phalène risquent de dépérir. Morale de la fable : quelques degrés de plus, et c’est tout l’écosystème qui est en péril.
A chacun sa température
Révélée par des zoologistes néerlandais en 2000, cette histoire décrit comment le changement climatique déboussole le vivant, au point d’en laisser certains sur le carreau. Et elle fait, hélas, figure de cas d’école.
Depuis un siècle, la planète s’est réchauffée de 0,9 °C. Et elle enregistre 0,2 °C supplémentaire chaque décennie depuis 1979. Or, la majeure partie des phénomènes printaniers, qu’ils concernent les végétaux ou les animaux, se règle sur les variations du thermomètre. Il existe même un seuil propre à chaque espèce qui déclenche la sortie du sommeil hivernal.
Pour la flore, c’est la hausse des températures qui provoque l’éclosion des bourgeons en mars, la floraison vers mai, la fructification en juin et la maturation des fruits en été.
Une nature désynchronisée
Or, les études le montrent : cette séquence commence de plus en plus précocement. Les arbres fruitiers fleurissent deux semaines plus tôt qu’il y a vingt-cinq ans, soit à la mi-avril. En accélérant les rouages intimes de la nature, le réchauffement modifie en cascade le développement des êtres vivants. Chacun voit son horloge décalée, mais pas forcément au même rythme ! Une désynchronisation qui menace la survie de la mésange et de la phalène – et d’autres espèces.
Par ailleurs, en Alsace, le débourrement de la vigne de riesling ne s’observe plus début mai, mais début avril. Le champagne, lui, se vendange deux semaines plus tôt qu’il y a vingt ans. Les cultures remontant toujours plus au nord pour fuir la hausse des températures, celle-ci annonce une grande redistribution des cartes agricoles.
Le côté positif de l’histoire, c’est que des régions comme la Bretagne pourront cultiver des espèces que leur climat leur interdisait jus qu’alors. Quant au chêne, à la mésange et à la chenille, la sélection naturelle favorisera-t-elle les individus capables de se resynchroniser, rattrapant ainsi le décalage provoqué par le réchauffement ? A suivre…
D’après Science & Vie QR n°25 « Les plantes, leurs secrets & leurs vertus »