INSECTES: Alimentation animale du futur ?
Des chercheurs est-africains ont identifié des insectes pouvant intervenir dans la fabrication d’aliments pour animaux plus nutritifs que les farines de poisson.
Au Kenya et en Ouganda, une initiative de recherche multi-bailleurs développe actuellement des aliments pour animaux à base d’insectes aux qualités nutritionnelles supérieures, garants d’un élevage de volailles et de poissons durable, sûr et rentable. Les chercheurs qui participent au projet “Intégration d’insectes aux aliments pour la volaille et le poisson en Afrique subsaharienne” (INSFEED) mené par le Centre international de physiologie et d’écologie des insectes, ont identifié 16 espèces bien plus riches en protéines brutes, en acides gras polyinsaturés, en flavonoïdes, en vitamines et en minéraux que les farines de poisson utilisées actuellement dans les aliments pour la volaille et le poisson.
L’élevage de volaille et la pisciculture comptent parmi les secteurs agroalimentaires à la plus forte croissance dans de nombreux pays d’Afrique subsaharienne. La très bonne santé de ces secteurs offre aux petits exploitants une bonne occasion d’augmenter leurs revenus.
Cependant, la demande en aliments pour animaux de qualité augmente également. Ces aliments représentent 60 à 70% des coûts de production et le coût élevé des poissons d’argent entrant dans leur fabrication est rédhibitoire. Le potentiel du marché des aliments pour animaux à base d’insectes a été évalué avec l’aide de fabricants d’aliments du secteur privé; des entretiens avec des petits exploitants ont montré que 91 % des éleveurs de volaille et 85 % des pisciculteurs souhaitent utiliser des aliments à base d’insectes. Le projet INSFEED a alors formé plus de 75 éleveurs et jeunes agripreneurs à l’élevage de masse d’insectes. Cet élevage est basé sur des techniques durables, accessibles et rentables, comme la récolte des mouches bleues du genre Calliphora, une espèce abondante localement.
Pour remplacer seulement 5 % de la farine de poisson utilisée dans les aliments pour volaille fabriqués au Kenya, pas moins de 32 000 tonnes d’insectes secs seraient nécessaires. Il est donc essentiel d’associer les jeunes agripreneurs à la production de ces volumes. Au Kenya, un projet de recherche – the Metro AgriFood Living Lab – aide des jeunes à lancer leur propre entreprise, et, parmi eux, beaucoup s’intéressent à l’élevage d’insectes. Depuis 2015, des formations ont ainsi permis à 35 jeunes d’élaborer des projets d’entreprise de qualité afin d’attirer les financements de banques et d’institutions de microfinance. Le Dr Dorothy Nakimbugwe, en charge du projet, explique : “C’est vraiment fabuleux d’entendre le public manifester son enthousiasme et son intérêt dans des émissions de radio locale. Nombreux sont les auditeurs qui demandent où se procurer des insectes pour l’élevage.”
Au Kenya, suite au succès d’une série de réunions visant à encourager l’utilisation d’insectes dans les aliments pour bétail, le Comité national de l’alimentation du bétail a préparé et publié en janvier, aux fins d’examen public, un projet de réglementation pour l’utilisation d’aliments à base d’insectes. Son homologue ougandais planche, quant à lui, actuellement sur l’amendement à la réglementation sur l’alimentation animale, qui inclut désormais les insectes.
Sophie Reeve, SPore