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Fraises

FRAISE : Difficultés du choix variétal

Le choix de la variété et la qualité du plant de départ constituent le premier pas vers une bonne production de fraise. Aujourd’hui, de nombreuses variétés sont à la disposition des producteurs marocains, le choix étant dicté par les objectifs de production. Toutefois, en général, les producteurs optent pour une combinaison de plusieurs variétés afin de couvrir l’ensemble du cycle et mieux répondre aux impératifs des débouchés (précocité, frais, surgelé).

 Au Maroc, l’offre en fraise est restée longtemps dominée par une seule variété, mais avec la mondialisation des échanges et le risque de perte de parts de marché, les professionnels ont senti la nécessité de diversifier la gamme destinée à l’export. Ils ont ainsi opté pour de nouvelles variétés de fraisier dotées de performances supérieures, notamment en termes de précocité, de gustativité et de conservation.

La stratégie adoptée dans ce domaine a permis entre autres, de rallonger la période d’exportation et d’accéder à des segments de marché supplémentaires. Certains producteurs ont même exploré d’autres voies de diversification en introduisant de nouvelles espèces fruitières à haute valeur ajoutée et très demandées sur les marchés européens comme les framboises, les myrtilles et les mures.

Diversification variétale

Au Maroc, la culture de la fraise est annuelle et le matériel végétal est renouvelé chaque année. Ceci permet aux producteurs de produire un fruit de haute qualité et d’assurer un bon contrôle phytosanitaire de la culture. L’approvisionnement en plants de fraisier en motte et à racines nues est assuré exclusivement par l’importation. Le nombre des plants importés chaque année est d’environ 190 000 000 plants, sachant que la densité de plantation est de 60.000 plants /ha.

Au niveau du choix du matériel végétal, on constate que depuis la période allant de 1990 à 2010, les seules variétés cultivées étaient la Tioga, la Chandler, l’Osogrande et la Camarosa. Ces variétés, et particulièrement la Camarosa, qui s’est progressivement imposée jusqu’en 2010, étaient des variétés homogènes, régulières et présentaient une nonne rentabilité aussi bien au niveau productif que financier.  Pour les agriculteurs, elles ont été à la base de l’essor de cette culture à son développement. Les producteurs marocains ont adopté la Camarosa notamment pour la surgélation, grâce à sa forme régulière, son gros calibre, sa couleur rouge vif et sa fermeté qui permet de la découper en cubes ou en tranches.

Par ailleurs, l’itinéraire technique facile de Camarosa associé à la désinfection du sol au bromure de méthyle a permis pendant cette période d’offrir des rendements élevés assurant une rentabilité élevée aux agriculteurs. Cependant, depuis 2010, on assiste au déclin de Camarosa et son remplacement par des nouvelles variétés qui ont connu au cours de cette période une nette évolution.

En effet, sur le plan commercial, la mise sur le marché d’un seul produit avec des caractéristiques données n’est pas la meilleure stratégie sur le long terme, vu l’évolution des goûts et des habitudes alimentaires du consommateur européen.

Les professionnels ont donc commencé à chercher de nouvelles variétés plus performantes et les producteurs se sont ouverts notamment à des variétés plus gustatives pour répondre à une exigence croissante des marchés. Globalement les variétés utilisées sont sensiblement les mêmes que dans la zone de Huelva (Espagne, notre principal concurrent), mais avec des proportions différentes : Festival, Splendor, Fortuna, San Andreas, Sabrina, Ventana, Sabrossa, Lusa, Benicia et d’autres variétés.

Cependant, malgré ce panel diversifié, certains fraisiculteurs déplorent un choix variétal limité, de même que l’absence de référentiel local sur le comportement des variétés et leur potentiel de production, ainsi que la forte dépendance de fournisseurs étrangers pour l’approvisionnement en plants et pour l’accès aux variétés performantes.

Ainsi, on note la difficulté des agriculteurs et surtout des petits d’entre eux, à faire le choix pour chaque campagne et à rechercher la maitrise  technique au niveau aussi bien cultural et que de la protection sanitaire, vu que chaque variété possède des spécificités propres aussi bien au niveau des besoins en eau, de la fertilisation que  de la sensibilité aux maladies et aux ravageurs.

En conséquence, se pose de manière évidente, la problématique de la recherche des variétés de fraise qui peuvent permettre d’atteindre les objectifs suivants :

  • Obtention de rendement élevé avec absence de traitement de sol au bromure de méthyle et leur adaptation aux conditions du sol et au climat du Maroc.
  • Acceptabilité des ces variétés par les supermarchés et clients du Maroc.
  • Itinéraire technique clair et accessible pour l’ensemble des agriculteurs.
  • Faire le bilan des connaissances et sa transmission de façon continue aux agriculteurs pour permettre le suivi permanent et le développement de la culture au Maroc sur le terrain.

Pour la profession, une variété de fraise idéale pour le Maroc devrait être dotée des caractéristiques suivantes :

– Précocité : entrée en production la première semaine de décembre

– Productivité: élevée (plus de 900 g/plant)

– Forme des fruits : conique

– Couleur : Rouge aussi bien à l’intérieur qu’à l’extérieur

– Goût et brix (taux minimum de 8)

– Fruit ferme qui permet un long shelf-life et la coupe pour le surgelé

– Tolérance aux maladies et ravageurs

Création variétale

Cependant, il faut souligner que la mise au point d’une nouvelle variété est un travail de longue halène. En effet, les attentes des producteurs de fraises en matière d’innovation variétale sont assez diffuses et complexes. Les obtenteurs sont ainsi à l’écoute des producteurs et des consommateurs pour définir les critères de qualité et de production qu’ils recherchent. L’objectif étant de créer des variétés qui apportent un plus (qualitatif ou technologique) et qui satisfont les attentes de toute la profession. « Au-delà de l’aspect gustatif, il faut rechercher des variétés capables de se démarquer du produit standard tout en assurant au producteur rendement, facilité de cueillette, résistance aux maladies,… La création variétale doit même en anticiper les besoins», explique un obtenteur.

Le processus d’obtention est long et complexe. Il nécessite près de dix années entre la conception d’un projet par le croisement initial de deux plantes et la mise sur le marché de milliers de plants d’une variété commerciale. Mais il existe de nouveaux outils en génétique, les biotechnologies, qui améliorent considérablement le processus de création variétale. Utilisées en appui à la création variétale, ces biotechnologies permettent de mieux exploiter la diversité, de connaître le génome, de diminuer la durée de création, de certifier et de protéger les nouvelles obtentions. Elles font intervenir plusieurs disciplines spécialisées, mais complémentaires telles que l’expérimentation (essais en conditions naturelles et notations), la culture in vitro (multiplication des pathogènes responsables de maladies), la pathologie (tests biologiques d’infection en conditions contrôlées), la biochimie, la biologie moléculaire (génétique) et la bio-informatique (analyse des données).

La collaboration avec les universités et instituts de recherche apporte une aide méthodologique sur les aspects génétiques et physiologiques pour mettre au point de nouveaux marqueurs moléculaires en appui à la création de nouvelles variétés de fraises.

Axes de recherche

Les critères étudiés au sein des programmes de recherche sont souvent choisis sur la base de discussions avec la filière professionnelle. Certains critères intéressent l’ensemble des obtenteurs, notamment la floraison, la résistance aux maladies et la richesse en antioxydants, etc. En effet, la maîtrise de la floraison du fraisier permettrait de mieux gérer les périodes de production. L’allongement de la période de production est le meilleur moyen d’augmenter le potentiel de rendement au niveau de la plante sans nuire à la qualité gustative du fruit.

Par ailleurs, la création de variétés de fraisier naturellement résistantes aux maladies permettrait de limiter l’utilisation des produits phytosanitaires (difficulté de gérer les Délais Avant Récolte). Le but est de permettre la production de fruits de qualité sans résidus, respectueux de l’environnement et d’en assurer le rendement (surtout avec la réduction du nombre de solutions pesticides autorisés par les cahiers des charges imposés par les chaines de distribution).

La qualité du fruit est aussi l’un des principaux objectifs de sélection des programmes de création variétale. En particulier, la richesse en antioxydants est un caractère recherché pour la haute qualité nutritionnelle qu’elle confère à la fraise. Les autres axes de recherche concernent généralement :

– Productivité

– Bon calibre et couleur du fruit

– Homogénéité de la production et réduction des écarts

– Qualité organoleptique et nutritionnelle

– Facilité de récolte

– Résistance aux maladies et aux variations climatiques

– Bonne vie commerciale

La conduite technique : Un point crucial

Pour révéler pleinement ses potentialités génétiques, chaque variété requiert une conduite adéquate. Par conséquent, l’agriculteur devra maîtriser les techniques de culture appropriées et notamment la fertilisation (programme différent d’une variété à l’autre) pour concilier productivité, régularité de production et qualité des fruits tout au long de la campagne.

Sur ce point, les producteurs interrogés ont tenu à souligner le fait que pour plusieurs des variétés actuellement disponibles, ils ont du apprendre, parfois à leurs dépends, la conduite adéquate, ce qui prend dans certains cas des années (erreurs, échecs, tatonnements). Ils demandent donc aux fournisseurs de plants de fournir dorénavant, avec chaque nouvelle variété, des fiches techniques précisant leurs avantages, mais aussi leurs faiblesses et la manière de les contourner. Bref, le maximum d’informations techniques et les conditions optimales de production permettant de valoriser au mieux le potentiel productif et qualitatif de chacune.

D’ailleurs, pour éviter ce genre de problèmes dans l’avenir, l’une des solutions proposées par la profession est la mise en place d’un centre de recherche dans la région de production, dont la mission serait de mener des essais sérieux sur les différentes variétés existantes pour déterminer celles qui conviennent le mieux aux conditions de production et du marché. Mais un tel centre ne saurait voir le jour sans une aide de l’Etat.

Conscientes de l’importance de la thématique du choix variétal pour le secteur, les associations AMPFR  et AMCEF organisent des journées d’étude au profit des producteurs, en invitant les principaux fournisseurs internationaux de plants de fraisier au Maroc (obtenteurs et pépiniéristes). C’était le cas de la journée organisée récemment en marge de la première édition du festival des fruits rouges de Larache, et qui a connu une participation massive des professionnels concernés.

 

 

 

 

 

 

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